Monsieur A.

Je ne m'apprêtais pas à écrire ce soir, il ne s'est rien "passé de spécial" & je n'ai pas de considérations hautement philosophiques à partager. Je n'ai pas gagné au loto, pas aperçut le christ & dans le miroir je suis la même qu'hier..

Mais une pensée vient de me traverser l'esprit, juste avant de délaisser l'ordinateur... si, il y a eu quelque chose aujourd'hui, comme (presque) tous les samedis, certes, mais quelque chose que je n'ai, jusqu'à maintenant, fais que mentionner ici.

J'ai fais les courses de Mr. A. (pour les intimes =D). Mon "p'tit vieux"; mon "grand-père belge"; mon "gagne-pain" aussi.
Depuis 3ans & demi bientôt j'effectue, presque tous les samedis, les courses de cet octogénaire.
Je passe chez lui prendre la liste de courses, la carte de supermarché, un billet de 20€ & son petit caddie puis je m'en vais, solitaire & endormie, vers le Delhaize du coin.

Souvent, dans mon esprit embuhé (le samedi l'éveil est souvent difficile, je tente de mettre mon réveil à 9heures mais pour peu que j'ai vu un film ou que je sois sortie la veille... c'est une mission complexe que de me lever>quand je loge pas chez moi je passe chez lui plus tard, il me prépare le repas parfois), je constate milles & unes choses particulières au supermarché à 10heures.

C'est le repère des personnes âgées; des mémés râleuses, des pépés soumis & des célibattaires en tous genres. Depuis quelques mois y'a un "golum" avec une voix terrifiante qui est aux alentours de 10h30 à la caisse panier. Il boit de l'orangina pendant que tout le monde s'écarte prudemment. Y'a aussi des caissières qui parlent de leurs prochaines vacances; de rares enfants disséminés de ci de là.

Le regard des personnes lorsque je sors les bières n'est plus le même qu'il y a quelques années; avant les gens semblaient s'insurger, peut-être pensaient ils "quoi, si jeune?" ou alors "et ses parents l'envoient ?? Pff".. Aujourd'hui on fait plus gaffe à mes bières, ou moi je fais plus gaffe à ceux qui font gaffe..

Je pourrais détailler mes voyages solitaires, un petit caddie noir en main, dans les allées de ce grand magasin, mais le plus intéressant dans l'histoire c'est lui, Mr. A., divorcé avec enfants.

Quand on est que tous les 2 on parle beaucoup [pour peu qu'un(e) ami(e) m'accompagne je ne m'éternisse pas & il arrive qu'il y ai de la famille, dans ce cas je ne m'impose pas]. Rencontre des générations, je trouve ça passionnant.

On parle de tout, du temps qu'il fait, de l'actualité, de l'école, de la mémoire qui part, du net ("je comprends pas..tu peux m'expliquer ça?","c'est joli le nouveau nom que tu as dans l'ordinateur[comprendre pseudo d'msn, il est connecté ;-)]"). Cela avec un verre de jus d'orange en main & un kinder bueno sur le coin de la table.

Il me raconte sa vie, par petites touches, je pourrais tenter de la reconstituer mais, 80 ans, ça se livre pas comme ça.. Il a connu la guerre, l'ère coloniale; il a été prof, vécu en Espagne; il a des correspondantes japonaises & argentines qui lui écrivent de jolies lettres colorées; il est parfois étrange___

Tout doucement les liens se créent; le rituel du jus d'orange & du petit caddie a sa place dans ma vie...une "contrainte" que j'ai cherché & dont je ressors pensive..jusqu'à quand?

Comments

[juan]

JE viens de lire cet article et je trouve ça très très touchant ce que tu a écrit
Je trouve que la société actuelle avec le net et l'adsl et le portable, le 3G, l'umts etc etc etc à perdu quelque chose d'essnetiel, le contact humain.
J'espère qu'il y aura bcp de personnes comme toi quand j'aurais 80 ans (si j'y arrive certe)


BAO